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Shekulli, balkans.courriers.info
Déficit énergétique : l’Albanie essaie de venir en aide au Kosovo
Traduit par Mandi Gueguen
Publié dans la presse : 12 décembre 2007
Mise en ligne : mardi 18 décembre 200

L’Albanie vit au rythme d’incessantes coupures de courants : les restrictions atteignent 4 heures par jour dans les meilleurs quartiers de Tirana, 17 heures dans les zones rurales. Pourtant, l’Albanie exporte du courant au Kosovo, lui aussi gravement frappé par le déficit énergétique, et menacé d’un embargo par la Serbie, qui pourrait avoir des conséquences catastrophiques.

Par Bashkim Shala

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La centrale de Fierza (Albanie)

 

L’Albanie, souvent elle-même plongée dans le noir, fournit au Kosovo de l’énergie. Les réserves en eau du lac de Fierza ne dépassent toujours pas les 280 mètres, mais les turbines parviennent à tourner. Les pluies de ces derniers jours ont augmenté les apports hydriques jusqu’à 350 mètres cubes à la seconde.

« Près de 1,2 millions de kilowatt/heures de courant électrique est importé par la Corporation Electroénergétique du Kosovo (KEK) depuis l’Albanie, pour aider à stabiliser la fourniture en énergie électrique », a reconnu le directeur de la KEK, Remzi Shahini.

L’Albanie fournit de l’énergie au Kosovo, alors que ce dernier se trouve confronté à de longues coupures d’énergie, surtout depuis la mise en place du plan ABC [1]. Les coupures sont tout aussi fréquentes en Albanie, d’autant plus que la principale centrale hydroélectrique du pays puise dans ses réserves. Le directeur de la KEK, Remzi Shahini, n’a pas spécifié si la quantité d’énergie importée d’Albanie correspondait à la quantité d’énergie que cette dernière à importé du Kosovo durant l’été ou bien si elle était réglée selon les tarifs du marché. Le Kosovo a dû faire face à des réductions brutales de son approvisionnement en énergie. Il manque aussi de charbon pour alimenter les centrales thermiques, à cause de glissements de terrains dans les massifs contenant du charbon.

Le Kosovo dépendant de la Serbie

« Le Kosovo n’importe de l’énergie de la Serbie qu’en période de crise. Depuis plusieurs jours nous n’avons échangé la moindre quantité de courant électrique avec la Serbie », affirme le directeur de la KEK. Selon lui, deux blocs de la centrale thermique Kosova B produisent 267 MW/h, et un bloc de la centrale thermique Kosova A produit entre 120 à 140 MW/h d’énergie. Il a assuré que des efforts étaient fournis pour mettre en action deux autres blocs de Kosova A. D’un autre côté, le gouvernement serbe a prévenu qu’il interromprait toute fourniture en énergie électrique au Kosovo si ce dernier déclarait unilatéralement son indépendance, menaçant même de bloquer les autres voies de fourniture en énergie. Le Kosovo importe 40% de son énergie électrique de Serbie, et le reste de Macédoine, d’Albanie et du Monténégro. Or, la Macédoine et la Grèce manquent souvent elles-mêmes d’énergie. Dans ce cas, le Kosovo se retourne vers la Serbie ou la Bulgarie. Dans tous les cas de figure l’acheminement se fait à travers la Serbie.

Cependant, la Serbie pourra difficilement mettre sa menace à l’œuvre car elle risquerait de porter préjudice à la minorité serbe vivant au Kosovo, qui dépend de Belgrade pour tous les services fondamentaux. En réalité, affirment les fonctionnaires kosovars, les actions serbes ne risquent pas d’avoir une influence drastique, car depuis huit ans le Kosovo se trouve hors du contrôle serbe. Les seuls liens pratiques avec la Serbie se traduisent par les échanges énergétiques, le commerce et le transport routier. « Si la Serbie réagit, elle gênera le Kosovo, mais aussi la Macédoine, l’Albanie et la Grèce. Le Kosovo est un pays de transit pour tous ses voisins », explique Nezir Sinani, porte-parole de la KEK.

Le ministre de l’Energie et des Mines, Ethem Çeku, a affirmé qu’il envisageait l’éventualité d’importer de l’énergie des réseaux albanais, monténégrins et macédoniens. 80 % de l’énergie électrique qui passe dans le réseau kosovar à 400 kilovolts est de l’énergie en transit, destinée à d’autres pays de la région. Ces derniers temps, le bassin de la centrale hydroélectrique de Fierza, qui exporte l’énergie vers le Kosovo, a réussi à maintenir un niveau de 280 mètres, alors que les turbines travaillent en alternance, surtout en période de hausse de consommation. Les dernières pluies ont augmenté la production locale et ont rendu possible l’exportation d’énergie - ou, au moins, le remboursement des dettes de l’été. Entre août et septembre 2007, le Kosovo a fourni à l’Albanie 1,5 millions KWh, principalement durant la nuit. Le transport de l’énergie électrique est assurée par la ligne haute tension de 220 KV Fierza-Prizren (par la station de Nasheci).

Bas niveau de retenue au lac de Fierza

L’Albanie tire 99% de son énergie électrique de ses ressources hydriques, alors que le Kosovo compte essentiellement sur ses ressources thermiques, notamment le charbon. Les demandes d’énergie électrique en période de pic sont de 530 MW/h d’énergie. Le Kosovo importe 120 MW/h d’Albanie, ce qui représente moins de la moitié de la capacité de production d’un bloc de la centrale hydroélectrique de Fierza durant vingt quatre heures.

La centrale hydroélectrique de Fierza est la plus grande d’Albanie. Sa capacité de production, en pleine puissance, à travers les quatre blocs disponibles, est de 1200 MWh. Les réserves hydriques actuelles ne permettent de faire travailler à plein régime que deux turbines, sans affecter le niveau de 280 mètres du lac, puisqu’une turbine doit disposer d’environ 120 mètres cubes à la seconde. Le niveau maximal du lac de Fierza est de 296 mètres, le « point mort » est à 242 mètres : à ce niveau les turbines ne fonctionnent plus. Lorsque le niveau des eaux au lac de Fierza descend en dessous de 260 mètres, les turbines ne peuvent plus tourner normalement, puisqu’elles rencontrent des problèmes techniques avec les mécanismes hydrauliques. La puissance normale d’une turbine, quand le niveau dépasse 260 mètres, est de 125 MWh, mais elle descend à 75-80 MWh, expliquent les spécialistes, lorsque le niveau descend en dessous de 260 mètres.

Alors que les pluies tombées depuis plus d’un mois ont assuré un important apport en eau, des restrictions drastiques d’énergie sont en vigueur dans tout le pays. La carte des restrictions commence à quatre heures par jour, pour les quartiers les plus chanceux de Tirana. Dans les zones rurales, les plus mal loties, les coupures vont jusqu’à 17 heures par jour. Des sources proches de la Corporation Energétique Albanaise (KESH) ne donnent guère l’espoir d’une amélioration de la situation, mais elles assurent que l’entreprise fournira de l’énergie pour les fêtes de fin d’année. On ne sait en revanche pas encore si les restrictions seront moins importantes en 2008.

La consommation albanaise en énergie est de 17 millions de kWh. La KESH produit 11 millions de kWh et en importe 6 millions.

[1] Le Kosovo est partagé en trois zones, A, B et C, en fonction du niveau de paiement des abonnés.