Daniel Cohn Bendit es candida en una llista verda a França

Daniel Cohn Bendit change de terre d’élection comme on change de chemise. Une fois candidat aux élections européennes en Allemagne (2004), une fois candidat en France (1999, 2009), l’Europe, pour lui, est plus qu’une nécessité, c’est une évidence. Symbole du mouvement vert franco-allemand post-mai 68, Daniel Cohn Bendit joue aujourd’hui en France : il compte se présenter comme tête de liste verte et associative aux prochaines élections européennes.

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Daniel Cohn Bendit

(Source : linkselente sur Flickr)

La plate-forme écologiste européenne de Daniel Cohn Bendit a été imaginée à l’automne 2008, tandis que les listes des autres partis n’étaient pas encore formées. L’avantage en terme de temps a permis une large médiatisation pour l’ex-leader étudiant et ses nouveaux alliés (Verts et personnalités issues de la « société civile »). Les têtes de listes régionales sont, à ce jour, les suivantes : H. Flautre au Nord Ouest, S. Bélier au Nord- Est, Y. Jadot à l’ Ouest, D. Cohn-Bendit et E. Joly en Ile-de- France, J. Bové au Sud- Ouest, J.-P. Besset en Massif central-Centre. Au delà de l’aspect médiatique, il convient de s’interroger sur la capacité de cette plate-forme électorale à rencontrer le succès et sur ce qu’elle peut apporter à « l’agora européenne » que constituent les élections européennes. A ce titre, on verra que la plate forme écologiste comporte des tensions internes, synonymes d’obstacles, et qu’elle s’inscrit difficilement dans un contexte européen.

Des tensions internes à dépasser

En dépit de leurs traditionnelles divisions et d’une réticence naturelle de tout parti à ouvrir ses listes à des personnalités de la société civile, les Verts ont choisi de valider la démarche de rassemblement à une très large majorité dès décembre 2008. Cette ouverture pose le défi de la cohérence. En effet, on retrouve, au sein de cette plate- forme, une première tension entre des personnalités « politisées », ancrées dans une « gauche alternative » (J. Bové, H. Flautre, D. Cohn- Bendit) et d’autres qui ont moins intégré les codes de la politique partisane ( S. Bélier, J.-P. Besset, E. Joly).

A cette tension, s’ ajoute une deuxième tension au sein même de chaque « groupe » : du côté des politiques, J. Bové et D. Cohn- Bendit ont eu par le passé des positions opposées sur les sujets européens (lors du débat référendaire de 2005 en France, notamment), du côté des « associatifs », le profil plus radical et international de GreenPeace (Y. Jadot, ex- directeur des campagnes) a pu être opposé à celui, plus local, de France Nature Environnement (S. Bélier, ex- directrice fédérale) ou à celui, moins radical, de la Fondation Nicolas Hulot (J.-P. Besset, proche de N. Hulot).

Pour créer une dynamique de succès, ces tensions devront être dépassées. D’ores et déjà, trois éléments d’unification ont marqué les étapes de la création de cette plate- forme électorale : la médiatisation des têtes de liste autour de D. Cohn- Bendit constitue une « locomotive électorale », la mise en ligne d’un site internet et la publication d’un manifeste commun renforcent la cohésion de la plate- forme écologiste.

Par ailleurs, les Verts ne sont pas les seuls à être confrontés à ce type de tensions politiques : d’une part, les élections européennes offrent souvent l’occasion aux partis politiques de s’ouvrir à des « personnalités de la société civile » (tel P. Gaubert, tête de liste de l’UMP en Ile-de- France en 2004, ancien président de la L.I.C.R.A), d’autre part, au sein même des grands partis, les candidats présents sur les mêmes listes sont en désaccord sur les enjeux européens (ainsi, sur les listes du Parti Socialiste des élections européennes de 2004, B. Hamon ou M-N. Liennemann, élus sur la même liste qu’ H. Désir ou M. Rocard, ont manifesté de profonds désaccords lors du débat référendaire français puis de la ratification du traité de Lisbonne). Si ces tensions sont naturelles, il convient toutefois de trouver un moyen de les transformer en dynamiques et non en cacophonie.

De même que la majorité des partis travaillistes et socio-démocrates d’ Europe est historiquement liée aux syndicats ouvriers, l’ histoire des Verts, en France et en Europe, est profondément liée à celle des grandes associations écologistes (Amis de la Terre, GreenPeace, France Nature Environnement). Cette proximité se retrouve dans les parcours des dirigeants Verts (M. Rivasi, tête de liste dans le Sud- Est, est une ancienne directrice de GreenPeace) mais aussi dans les prises de position convergentes au Parlement Européen et, dans une moindre mesure, à l’Assemblée Nationale.

Si ces liens historiques entre militants associatifs et politiques sont évidents, il n’en demeure pas moins que, du fait de leur taille, les Verts ont plus de difficulté à porter un tel rassemblement que les grands partis traditionnels. De fait, il ne s’agit pas d’une liste des Verts ouverte à la société civile, mais d’une liste paritaire, où associations et Verts sont à égalité en termes de places éligibles.

Le risque de mener une campagne nationale en contradiction avec le programme des Verts européens

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Le Parlement européen

(Source : Fredonino sur Flickr)

L’autre défi qui se pose à la plate- forme écologiste de D. Cohn- Bendit provient de son inscription dans le cadre européen, c’est-à-dire au sein des Verts européens et plus généralement dans le débat politique européen.

Dans un premier temps, on remarquera que l’avance prise par la plate -forme écologiste en France tranche avec la longue absence de campagne européenne des Verts européens. En comparaison, le Parti Socialiste Européen (P.S.E) avait mis en place, dès 2007, une procédure de rédaction participative d’un « manifeste politique » dans l’optique des élections européennes de 2009. Adopté en décembre 2008 lors du Conseil de Madrid, le P.S.E possède déjà son manifeste commun. Profitant de l’absence de manifeste commun, de matériel commun, la plate- forme écologiste française a pu élaborer son propre agenda politique et ses propres thèmes (regroupés sous le concept de « New Green Deal »). Le concept de New Green Deal semble être repris par de nombreux partis verts européens (en Belgique ou au Royaume Uni) et au niveau européen. Cependant, le risque de ces mouvements à contre- temps est de voir le programme français de la plate- forme écologiste entrer en contradiction avec le manifeste des Verts européens.

De plus, on remarquera également que les partis européens de centre- droite s’acheminent vers des campagnes plus personnalisées : G. Watson, chef de file des Libéraux Démocrates au Parlement Européen, veut mener une campagne européenne en étant candidat à la présidence du Parlement, le P.P.E s’apprête à introniser J.M. Barroso comme « son » futur candidat à la présidence de la Commission. Les Verts européens, ainsi que le P.S.E, n’ont encore, à ce jour, proposé aucun nom.

D’autre part, il convient de constater que les Verts constituent aujourd’hui le cinquième groupe au Parlement Européen, en termes de nombre de députés européens. En 1999, le collège Prodi comptait une commissaire verte (M. Schreyer, commissaire au budget), cinq gouvernements comptaient des ministres verts (Allemagne, Belgique, Finlande, France, Italie) et le groupe vert était le quatrième groupe au Parlement Européen. Presque inexistants dans les « nouveaux » Etats membres (sauf en République Tchèque et en Lettonie), les Verts ont perdu en influence politique depuis 2004. Il n’y a plus de commissaire vert. On ne compte aujourd’hui que trois Etats membres comprenant des ministres verts : Finlande, Irlande, République tchèque. On notera que, dans chacun de ces gouvernements, les Verts font partie de coalition de centre-droite. Cette configuration, acceptable pour beaucoup de militants verts habitués au fédéralisme ou plus aptes au pragmatisme (les verts allemands, autrichiens, belges ou suédois gouvernent avec le centre-droite au niveau local), semble difficile à concevoir pour les partis verts de l’Europe du Sud (en Espagne, en France, en Italie, au Portugal). Cette hétérogénéité des situations nationales n’a pas empêché les députés européens verts de s’unir dans un même groupe et, allié aux régionalistes européens, de voter de façon de plus en plus homogène depuis 1994. Habitués à passer des compromis trans- partisans, les Verts européens ont su construire un positionnement politique, au Parlement Européen, au centre- gauche. Ce positionnement politique peut être une source de conflit pour la plate- forme écologiste de D. Cohn Bendit, qui incorpore des personnalités plus radicales, tel J. Bové.

Enfin, l’un des écueils à éviter pour cette plate- forme écologiste, est d’apparaître comme une solution aux difficultés des Verts français (possibilité d’affirmer sa force électorale avant les élections régionales de 2010) plus qu’un véritable apport au débat politique européen. Longtemps attachés à la dimension européenne des débats électoraux (grâce, notamment, à des candidats non nationaux, tels D. Cohn Bendit en France ou M. Frassoni en Belgique), les Verts français et leurs alliés semblent aujourd’hui recentrer leur campagne sur les enjeux français, telle que les suites du « Grenelle de l’ Environnement », ou la suppression par le président de la République du juge d’ instruction, ce qui empêche la possibilité d’un débat véritablement européen.

Des objectifs ambitieux

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Logo du Rassemblement Europe -Ecologie

En termes électoraux, les Verts et leurs alliés poursuivent un objectif ambitieux : augmenter le nombre d’euro- députés verts français. Sans compter D. Cohn- Bendit (alors élu en Allemagne), les Verts ont parvenu à faire élire 6 eurodéputés en 2004. Cet objectif peut se décliner en deux dimensions :
- au niveau français, les Verts veulent peser, dans l’optique des élections régionales de 2010, voire des élections de 2012. L’objectif est également de s’imposer comme le deuxième parti à gauche (devant le MO. DEM ou le Parti Communiste). On constatera, à ce titre, que D. Cohn- Bendit a réussi à s’entourer de personnalités divergentes et peut parvenir, comme il l’ a fait en 1999, à rassembler sur sa liste des électeurs traditionnellement plus modérés ou plus radicaux que l’ électorat écologiste traditionnel.
- au niveau européen, les Verts et leurs alliés veulent renforcer le groupe vert au Parlement Européen pour renforcer leur influence sur les politiques et les positions européennes, notamment lors des négociations sur le climat de la Conférence de Copenhague de décembre 2009.

Au delà de ces objectifs électoraux, plusieurs questions restent en suspens :
- les Verts, qui se sont opposés à la formation de l’alliance P.P.E- P.S.E lors du partage des commissions parlementaires et du mandat de président du Parlement Européen en 2004, auront- ils les moyens de peser, au Parlement Européen, pour former une majorité politique alternative ?
- la plate forme écologiste arrivera-t’ elle à transformer son manifeste politique (le New Green Deal) en corpus de propositions réalisables au niveau européen ?
- le message écologiste (« Consommer moins et mieux ») sera-t’ il audible dans un contexte de crise économique et sociale ? Comment peut- il s’intégrer au discours de la gauche et de l’allié naturel que constitue le Parti Socialiste (« défense du pouvoir d’achat et relance de la consommation ») ?
- cette plate- forme écologiste est-elle destinée à être répétée dans d’autres états européens ou n’est- elle possible que dans le cadre français ?

13-II-09, A. Bargas, Euros du Village