Quelles frontières pour l’Europe?

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Une question révélatrice des enjeux et incertitudes de l’UE

Par Gérard-François DUMONT, Pierre VERLUISE, le 2 avril 2015, diploweb

Co-auteurs de Géopolitique de l’Europe. De l’Atlantique à l’Oural, Paris, PUF, 2015
Recteur Gérard-François Dumont. Professeur à l’Université de Paris-Sorbonne, Président de la revue Population & Avenir 191 rue Saint-Jacques 75005 Paris. Site population-demographie.org.
Pierre Verluise Directeur du Diploweb.com, Distinguished Professor de géopolitique à GEM, professeur en CPGE, chercheur associé à la Fondation pour la Recherche Stratégique (FRS).

Que nous apprennent les frontières de l’Union européenne de ses limites ? La première partie de cette étude montre combien l’UE présente des frontières évolutives. La deuxième partie analyse la question des candidats étatiques, donc des éventuels élargissements futurs qui signifieraient un nouveau recul des frontières de l’UE. Enfin, l’examen de ce que l’on peut appeler les frontières migratoires permet d’approfondir la réalité géopolitique de l’UE.

Cette étude jusqu’alors inédite a été présentée au 7e Festival de Géopolitique, consacré aux frontières. Les références en italiques renvoient aux diapositives numérotées du diaporama installé ci-dessous.

Introduction

Quelles frontières pour l'Europe ?
Diaporama. Quelles frontières pour l’Europe ?
Réalisation : G-F Dumont, P. Verluise, 2015.

Diapositive n°1

A LA QUESTION « Quelles frontières pour l’Europe ? », nombre de bases de données internationales donnent une réponse géographique précise : elles livrent des statistiques d’un territoire appelée « Europe » qui va des possessions Atlantique du Portugal à la Russie incluse et des littoraux septentrionaux de la Méditerranée et de la mer Noire à l’océan glacial Arctique, en considérant la barrière montagneuse du Caucase comme la frontière entre l’Europe et l’Asie. Quant à la géographie physique [1], elle justifie d’abord la limite Atlantique du périmètre européen, attestant par exemple le caractère européen de l’Islande. Puis à l’Est, elle marque une claire frontière physique au sein de ce qu’on appelle la Russie d’Europe, celle à l’ouest de l’Oural, frontière située là où les terres ne subissent plus d’influence maritime.

En revanche, au plan des organisations ou du fonctionnement, les frontières de l’Europe sont multiples. Le Conseil de l’Europe, qui compte 47 pays, dont la Russie mais non la Biélorussie, déborde le Caucase en incluant ce qu’on appelait, autrefois, la Transcaucasie, soit la Géorgie, l’Arménie et l’Azerbaïdjan. Ce Conseil de l’Europe inclut deux autres pays que les bases de données internationales mettent en Asie occidentale, Chypre et la Turquie.

Derrière le singulier du mot Europe, se cache un pluriel des institutions aux périmètres différents : Conseil de l’Europe, OTAN, Union européenne, zone euro, espace Schengen.

De son côté, le périmètre des pays européens membres de l’OTAN dessine d’autres frontières qui séparent par exemple la Norvège qui en fait partie et la Suède qui n’en n’est pas membre. Quant à la zone euro, elle a ses propres frontières dues au fait que plusieurs pays européens, comme le Royaume-Uni, ne souhaitent pas y entrer. Si, désormais, l’Europe est définie comme un espace de libre circulation au sein duquel les douanes terrestres ont disparu, soit la zone Schengen, une autre géographie s’observe : elle inclut des pays qui ont refusé de rejoindre l’Union européenne (UE), comme la Norvège et la Suisse, mais ne comprend pas toutes les États-membres de l’UE pour des raisons fort différentes : certains parce qu’ils refusent de faire partie de l’espace Schengen (Royaume-Uni et Irlande), d’autres parce qu’ils n’y ont pas été acceptés à ce jour (Roumanie, Bulgarie, Croatie). Derrière le singulier du mot Europe, se cache donc un pluriel des institutions aux périmètres différents : Conseil de l’Europe, OTAN, Union européenne, zone euro, espace Schengen.

Au sein de cette Europe, et quels que soient les contours donnés à ce terme géographique, chaque État a des frontières, c’est-à-dire des limites au territoire sur lequel il exerce sa souveraineté. La quasi-totalité de ces frontières sont internationalement reconnues. Toutefois, des conflits frontaliers ont pu mettre du temps à être réglés, comme entre la Slovénie et la Croatie. Certaines frontières internationales sont reconnues par certains pays et non par d’autres, ce qui est le cas du Kosovo dont l’indépendance (2008) n’est pas reconnue par cinq pays membres de l’UE et dont l’adhésion à l’Onu n’a pas, à ce jour, été acceptée. En outre, des conflits témoignent du fait que certains États dont les frontières sont internationalement reconnus ne parviennent pas à exercer leur souveraineté jusqu’à elles, comme la Moldavie ou l’Ukraine. En outre, dans certains pays comme la France, on parle de zones de non-droit [2], ce qui veut signifier que la loi ne parvient pas à être appliquée sur certains territoires. Enfin, le mot frontière renvoie aussi aux limites, limites spatiales mais aussi, depuis 2006, selon l’UE, limites de la capacité d’absorption de nouveaux États membres par cette organisation régionale.

Compte tenu de l’ampleur de la formulation du titre, examinons exclusivement la question des frontières de l’UE. Précisons d’abord que l’éventuelle prise en compte par l’UE de la Russie ne se pose pas : la Russie n’a jamais demandé à entrer dans l’UE, l’UE ne lui a jamais proposé, et la Russie a la taille géographique [3] et le comportement géopolitique d’un vaste empire. Or l’UE réunit des États, non des empires. La problématique ici posée est donc la suivante : Que nous apprennent les frontières de l’Union européenne de ses limites ?

Diapositive n°2

La première partie montrera combien l’UE présente des frontières évolutives. La deuxième partie analysera la question des candidats étatiques, donc des éventuels élargissements futurs qui signifieraient un nouveau recul des frontières de l’UE. Enfin, l’examen de ce que l’on peut appeler les frontières migratoires permettra d’approfondir la réalité géopolitique de l’UE.

Diapositive n°3

I. L’UE présente des frontières évolutives…

Considérons successivement (A) une success story durant la Guerre froide, (B) comme après 1990. (C) Pour autant, l’UE élargie est-elle une puissance ?

A. Une success story durant la Guerre froide...

De la signature du traité de Rome en 1957 à l’année 1989, la question des frontières de cette organisation régionale qu’est la CEE ne se pose guère, d’abord pas en termes économiques. En effet, le Marché commun, qui débute en 1958, n’est pas un « club de riches », puisqu’il inclut dès l’origine un pays dont le PIB par habitant est alors assez faible, l’Italie.

Diapositive n°4

Pendant plusieurs décennies, cette question des frontières de ce qui ne s’appelle pas encore l’UE n’est matière ni à inquiétude sur son sens, ni à discussion sur le fond. Les limites envisagées de cette organisation sont implicitement définies par les principes de liberté qui sont au cœur des constitutions de ses États-membres. Du côté oriental, une identité européenne fait frontière car elle exprime une opposition à l’idéologie communiste, ce qui est illustrée, a contrario, par le fait que les seuls partis politiques de pays européens de l’Ouest [4] à s’inquiéter de, ou à tenter de s’opposer à la mise en œuvre d’une Europe libre ayant vocation à s’unifier sont les partis communistes. En fait, ces derniers sont partisans d’une Europe réunie autour du grand frère soviétique et non autour de valeurs opposées au totalitarisme soviétique. D’un côté se trouve donc la croyance en la construction du communisme, en l’homme nouveau, au nom de laquelle non seulement le pluralisme politique est interdit, mais le centralisme bureaucratique, tout comme les violences d’État sur les personnes, justifiés. De l’autre, il y a le refus de passer sous la coupe d’un régime liberticide qui, après avoir vassalisé les pays européens de l’Est, s’efforce d’étendre son emprise sur l’Ouest. Dans ce contexte, l’URSS apporte d’importants soutiens logistiques aux partis « frères » ainsi qu’à divers mouvements d’Europe de l’Ouest susceptibles de lui faciliter deux de ses objectifs géopolitiques : faciliter la conservation de sa mainmise sur l’Europe de l’Est grâce à des activités de propagande ; étendre si possible son influence à l’Ouest en y développant le communisme. Compte tenu de ces ambitions, l’URSS fait preuve d’une certaine indulgence pour les quelques régimes autoritaires de l’Europe méridionale, espérant s’en approprier l’héritage, ce qui a failli se produire au Portugal en 1974.

Les principes de liberté de la Communauté économique européenne (CEE) naissante signifient donc tout simplement l’impossibilité de faire entrer au sein de l’organisation des pays qui seraient sous l’emprise du totalitarisme communiste. Comme cette emprise, en Europe centrale et orientale, est souvent jugée inextinguible, elle définit les frontières orientales de la CEE, correspondant tout simplement au rideau de fer que Moscou a fait installer aux limites occidentales des États qu’il a contraint à passer sous son joug, y compris la partie orientale de l’Allemagne qui forme alors la RDA.

Diapositive n°5

Au Sud-Ouest, les frontières de la CEE sont également objectivement marquées, et sans nulle contestation : elles sont fixées à la limite qui sépare la France de deux pays dont le régime politique est liberticide - l’Espagne et le Portugal - jusqu’à ce que, au milieu des années 1970, ces pays deviennent démocratiques.

En revanche, au Nord-Ouest, dans les années 1960, un débat sur les frontières nord-occidentales de la CEE a lieu au sujet du Royaume-Uni. Il s’agit de savoir si la construction européenne doit viser à une pleine indépendance vis-à-vis des États-Unis ou, au contraire, privilégier des relations étroites avec cette grande puissance. Accepter l’entrée du Royaume-Uni au sein du Marché commun suscite un doute : ce pays préfère-t-il l’Europe ou le « grand large » ? Donne-t-il plus d’importance à des relations avec les Etats-Unis qu’à celles avec les pays de l’Europe continentale ? Au pouvoir en France, le général de Gaulle craint un Royaume-Uni trop atlantiste. En 1963, il met son veto à la première demande d’adhésion de la Grande-Bretagne au sein du Marché commun. De 1967 à 1969, le même Général de Gaulle oppose un second veto à la deuxième demande d’adhésion de la Grande-Bretagne au sein du Marché commun. Puis le général de Gaulle quitte le pouvoir en 1969 et meurt en 1970. Son successeur, Georges Pompidou, prend une position différente : en 1973, l’entrée du Royaume-Uni dans la CE est actée et acceptée par les Français à l’occasion d’un référendum.

Au nord de l’Europe, les frontières de l’UE se trouvent arrêtées par la Norvège car ce pays refuse par référendum, par deux fois, d’entrer dans l’UE (1972, 1994). Ces votes négatifs s’expliquent par le fait que ce pays se considère protégé par l’OTAN, que son économie dispose de pétrole offshore et qu’il craint les quotas de pèche qui seraient imposés par Bruxelles.

Ainsi, pendant plusieurs décennies, des années 1950 aux années 1980, les frontières de la CEE, tout particulièrement ses frontières orientales, celles qui désignent les limites de « l’Europe libre », selon l’expression employée à l’époque, suscitent nulle interrogation. Pour ceux qui œuvrent en faveur d’institutions communes aux démocraties européennes de l’Ouest comme pour ceux opposés à la construction européenne, la question ne soulève aucun débat. Les frontières orientales s’identifient dans le miroir de la peur d’un ennemi totalitaire qui dispose en outre d’un armement puissant, utilisé d’ailleurs à Budapest en 1956 ou à Prague en 1968. Jusqu’à la fin des années 1980, les frontières de la CEE relèvent donc pratiquement du non-dit. Ce qui est évident, ce qui va de soi n’a pas besoin d’être énoncé.

En outre, toujours dans cette période antérieure à 1990, l’UE a, une fois n’est pas coutume, précisé explicitement l’une de ses frontières en refusant de donner suite à la demande d’adhésion du Maroc en 1987.

Diapositive n°6

B. … comme après 1990.

Après l’unification de l’Allemagne (1990) et l’implosion soviétique (1991), le regard sur les frontières de l’Union européenne se trouve bouleversé. La fin du rideau de fer rend possible des reculs auparavant impensés qui s’effectuent selon la formule suivante : l’OTAN donne le rythme, l’UE court derrière. C’est ce que démontre cette carte réalisée par Charlotte Bezamat-Mantes pour le Diploweb.com.

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Carte. Les élargissements de l’OTAN...
... donnent le rythme de ceux de l’UE. Cliquer sur la vignette pour agrandir la carte
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Carte. Les élargissements de l’OTAN...
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Diapositive n°7

Rappelons d’abord que le 1er janvier 1995 survient le quatrième élargissement de l’Europe communautaire au bénéfice de l’Autriche, la Finlande et la Suède. Il s’agit du premier élargissement de l’UE post-Guerre froide, puisque l’URSS n’aurait probablement pas accepté que la Finlande adhère. À cette date, les procédures de rapprochement entre l’OTAN et les anciens satellites ou membres de l’URSS ayant acquis leur pleine indépendance sont déjà bien engagées. Ce qui n’est pas sans conséquences pour l’UE.

Une fois la Guerre froide terminée, il devient légitime de s’interroger au sujet de la pérennité de l’OTAN. « Mission accomplie », avancent certains stratèges américains qui considèrent que cette alliance militaire lourde, contraignante et coûteuse doit maintenant être dissoute. Après avoir mis fin à leur alliance militaire – le Pacte de Varsovie - la Russie attend évidemment que les États-Unis fassent de même avec l’OTAN. Mais, finalement, l’OTAN l’emporte par sa force d’inertie, sa capacité à se réinventer et son attractivité pour des pays à qui la Russie fait encore peur. En 1993-1994, lorsque le projet d’ouvrir l’OTAN à de nouveaux pays issus du bloc soviétique arrive sur la place publique, la Russie proteste avec virulence. Cependant, les 10 et 11 janvier 1994, l’OTAN lance son programme de coopération militaire avec les pays de l’Est : le Partenariat pour la Paix (PPP). Bien que Moscou accuse Washington de revenir à une posture de la Guerre froide, les élargissements de l’OTAN, puis de l’UE se mettent pourtant progressivement en place.

Ainsi,la Hongrie, la Pologne et la République tchèque deviennent membres de l’OTAN dès le 12 mars 1999, cinq ans avant leur adhésion à l’UE le 1er mai 2004, à l’occasion du cinquième élargissement.

Le 29 mars 2004, l’OTAN ouvre sa porte à l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la Slovaquie, ainsi que la Slovénie, issue de l’implosion de la Yougoslavie, en 1991-1992. Ces cinq pays deviennent également membres de l’UE le 1er mai 2004, soit quatre semaines plus tard, avec Malte et la République de Chypre qui, de leur côté, ne sont pas membres de l’OTAN. Relevons que la République de Chypre entre divisée par une frontière – puisque le nord de l’île est occupé par la Turquie. Paradoxe ou signe d’impuissance, l’élargissement de 2004 résulte étroitement du processus géopolitique qui a abouti à l’unification de l’Allemagne en 1990, et l’UE accepte néanmoins d’intégrer un pays divisé… Plus d’une décennie plus tard, l’île de Chypre, y compris sa capitale Nicosie, reste encore divisée, et cette frontière sonne comme un aveu d’impuissance de Bruxelles.

Ce cinquième élargissement de l’UE se fait donc au bénéfice de dix pays. D’une superficie cumulée de 738 300 km2, ils comptent alors 74 millions d’habitants [5]. Notons qu’à cette époque, le contexte stratégique permet d’intégrer à l’OTAN non seulement d’anciens satellites de l’URSS, mais aussi trois anciennes Républiques soviétiques : Estonie, Lettonie et Lituanie.

Les élargissements de l’OTAN et de l’UE entre 1999 et 2013 semblent appliquer, de facto, la même procédure non écrite : dans un premier temps, adhérer à l’OTAN, puis, dans un second, se porter candidat ou finaliser une adhésion à l’UE.

Toujours le 29 mars 2004, l’OTAN ouvre aussi sa porte à la Roumanie et à la Bulgarie, presque trois ans avant leur entrée dans l’UE, le 1er janvier 2007, pour son sixième élargissement.

Cinq ans plus tard, le 1er avril 2009, la Croatie et l’Albanie deviennent à leur tour membres de l’OTAN. À peine entrée, courant avril 2009, l’Albanie dépose sa demande de candidature à l’UE,. De son côté, la Croatie, issue de l’ex-Yougoslavie, devient le 28e membre de l’UE le 1er juillet 2013 ; c’est le septième élargissement.

Ainsi, les élargissements de l’OTAN et de l’UE entre 1999 et 2013 semblent appliquer, de facto, la même procédure non écrite : dans un premier temps, adhérer à l’OTAN, puis, dans un second, se porter candidat ou finaliser une adhésion à l’UE.

Mais cette procédure calendaire systématique, dans les élargissements de l’OTAN, puis de l’UE, est non-dite. Comment la comprendre ? Une fois la Guerre froide perdue par l’URSS, il convient de faire face à la nouvelle configuration stratégique de l’Europe géographique. Que faire des anciens satellites de l’ex-URSS et des anciennes Républiques soviétiques baltes qui aspirent à quitter sa sphère d’influence ? Que faire des pays issus de l’implosion de la Yougoslavie ?

La chronologie des décisions donne la réponse : l’OTAN prend en charge la sécurité – quitte à affaiblir de facto les chances de la politique de défense commune (UE) – et il revient à l’UE d’assurer pour longtemps l’intendance. À travers les fonds de pré-adhésion, puis de la politique régionale et de la politique agricole – sans prétendre à l’exhaustivité [6] – le support logistique supposant d’importants financements de l’UE peut s’étendre sur plus de trois décennies. On s’est bien gardé de l’expliquer aux contribuables des anciens pays membres.

Depuis 1995, ce sont donc 16 nouveaux États qui sont devenus membres à part entière de l’UE. A Vingt-huit, l’UE de 2015 compte 508 millions d’habitants sur 4,5 millions de km2. Une superficie qu’il ne faut surestimer, puisque l’UE-28 est 3,8 fois moins étendue que la Russie et 2 fois moins que les Etats-Unis. Mais la Zone économique exclusive (ZEE) cumulée des pays de l’UE est considérable compte tenu notamment des régions ultrapériphériques maritimes et îliennes de trois pays, l’Espagne [7], La France [8], et le Portugal [9]. Élargie en superficie et population à 28, l’UE est-elle devenue une grande puissance ?

Diapositive 8

C. Pour autant, l’UE élargie est-elle une puissance ?


En réalité, les cinquième, sixième et septième élargissements de 2004, 2007 et 2013 ont toujours concerné des pays plus pauvres que la moyenne de l’UE et engendré une hétérogénéité croissante.

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Carte : L’UE élargie est-elle une puissance ?
Carte et légende conçues par P. Verluise. Réalisation M. Seynaeve. Copyright Diploweb.com.
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Carte au format pdf. L’UE élargie est-elle une puissance ?
Carte et légende conçues par P. Verluise. Réalisation M. Seynaeve. Copyright Diploweb.com.

Diapositive n °9

La carte présentée, réalisée par Matthieu Seynaeve pour le Diploweb.com, le démontre. Elle permet d’abord de distinguer les pays devenus membres avant ou après la fin de la Guerre froide ; dans ce dernier cas, ils sont hachurés et se situent pour l’essentiel au nord et à l’Est. La légende – dans sa partie centrale – permet de distinguer combien ces élargissements successifs produisent un territoire hétérogène. En bleu foncé, les 11 pays dont le PIB par habitant en SPA est supérieur à la moyenne de l’UE en 2013. Et, en bleu plus clair, les 17 pays dont le PIB par habitant en SPA est inférieur à la moyenne de l’UE en 2013. Ce sont pour l’essentiel des pays des périphéries sud ou est de l’Union européenne. Certains, comme la Bulgarie ou la Roumanie, restent à des années-lumière du niveau de vie moyen de l’UE. Toutefois, les deux tiers des nouveaux États membres poursuivent leur « rattrapage » économique en dépit de la crise économique, en partie grâce aux fonds européens.

Au milieu des années 2010, l’UE reste la zone la plus exportatrice du monde, devant les États-Unis, la Chine, le Japon et le Canada. Mais ses importations demeurent supérieures à ses exportations hors UE. L’UE se présente donc comme une puissance commerciale… structurellement déficitaire, désormais depuis plus de deux décennies. Le seul véritable champion à l’export de l’UE est l’Allemagne fédérale. Un champion sur 28 pays membres… c’est peu. Voilà aussi une des limites de l’UE.

Certes, les pays membres réalisent entre eux près de 65% de leurs échanges commerciaux, mais ce système touche ses limites lorsque la croissance économique de l’ensemble reste atone comme depuis trop d’années.

L’Union européenne souffre d’un ADN défaillant en matière de culture de la puissance. Née d’un sous-continent qui a engagé de nombreux pays dans deux guerres mondiales, l’UE peine maintenant à vivre et penser la confrontation.

Les pays européens ont inventé, pour une large part, le processus de globalisation [10] et le monde d’aujourd’hui, mais beaucoup de leurs citoyens semblent avoir désormais le sentiment que ce processus leur échappe. En réalité, les pays européens ne font plus suffisamment d’efforts d’investissement en Recherche et Développement, cette R&D qui est la clé de l’innovation, de la productivité et donc de la compétitivité… bref, tout ce qui manque à l’UE pour défendre ses chances aujourd’hui et, plus encore, demain.

Pour revenir à la carte, l’UE élargie reste de surcroit marquée par des convergences et des divergences, par exemple en 2003 au sujet de la marche à la guerre des Etats-Unis en Irak. Par ailleurs, pour des raisons géographiques et historiques, les pays de l’UE n’ont pas tous les mêmes tropismes. Quand l’Allemagne et la Pologne font preuve d’un tropisme oriental, la France conserve un tropisme méditerranéen. En témoigne en 2007-2008 l’Union pour la Méditerranée, porté par la France. En témoigne, depuis 2009, le partenariat oriental porté par la Pologne.

Les différentes stratégies au sein de l’UE sont éclairées par le fait que 22 des 28 pays membres de l’Union européenne sont membres de l’OTAN, organisation militaire dirigée par les Etats-Unis. Dans ces conditions, comment une UE de la défense pourrait-elle se mettre véritablement en place, sachant en outre que les budgets de défense déjà modestes des pays européens continuent le plus souvent d’être rognés ?

En fait, l’Union européenne souffre d’un ADN défaillant en matière de culture de la puissance. Née d’un sous-continent qui a engagé de nombreux pays dans deux guerres mondiales, l’UE peine maintenant à vivre et penser la confrontation. L’UE préfère la coopération et le compromis. Pour ne pas dire les compromissions. En cherchant d’abord une paix perpétuelle entre ses membres, via le règlement pacifique des conflits, l’UE se pense ontologiquement comme un soft power, pas en hard power. Ni même en smart power. Alors que ces éléments gagnent à se combiner.

Depuis 2008-2009, la crise financière, économique et budgétaire fait office de révélateur des insuffisances de l’UE en matière de gouvernance économique, budgétaire, voire politique. À la faveur de la crise et parce qu’elle a su en quelque sorte l’anticiper par des réformes structurelles (réformes Schroeder-Hartz de 2003-2005) et en refusant les sirènes du surendettement, l’Allemagne d’Angela Merkel dispose de davantage d’arguments pour peser sur le tempo et le périmètre des nouveaux compromis et de nouvelles exigences. Parallèlement, la crise de la zone euro conduit à un glissement institutionnel. D’un fédéralisme monétaire sans gouvernance politique – l’euro – l’UE a glissé vers un fédéralisme budgétaire – le droit donné à la Commission européenne de surveiller depuis 2013 les budgets des Etats membres avant leur représentation nationale élue. Alors que le collège des commissaires n’est pas élu. Toute la question est de décider si on glisse ensuite d’un fédéralisme budgétaire à une véritable gouvernance économique, donc politique. Reste à savoir si un fédéralisme politique serait un gage de puissance, à quel prix et à quelles échelles.

Ainsi, en six décennies, les frontières de la construction communautaire sont passées de 6 à 28 pays. Et ces frontières à 28 ne pas définitives ; elle ne sont pas devenues indépassables puisqu’il serait possible de reculer à nouveau les frontières de l’UE en dépasser allègrement la trentaine de pays membres si l’UE intègre ses candidats officiels et officieux.

Diapositive n°10

II. … avec des candidats étatiques….

Effectivement, il existe (A) de vrais et de « faux » candidats à l’UE, (B) mais aussi des candidats officieux. (C) Cependant, au moins depuis 2005, il faut bien constater dans les opinions publiques une « fatigue des élargissements » dont les instances de l’UE semblent avoir partiellement pris conscience.

A. De vrais et de « faux » candidats...

À la lecture de ses différents traités, l’UE ne s’est jamais fixée de frontières explicites. La réalisation de l’Europe communautaire s’est toujours présentée comme un processus politique et économique ouvert à tous les pays européens disposés à adhérer aux traités constitutifs et à reprendre l’acquis communautaire, c’est-à-dire l’ensemble des droits et obligations qui lie les États membres de l’UE, dont les règlements et directives de l’UE [11]. D’un point de vue juridique, l’article 237 du traité de Rome stipule les conditions d’adhésion suivantes : « Tout État européen peut demander à devenir membre de la Communauté ». Cependant, la définition de l’adjectif « européen », pourtant utilisée pour refuser la demande d’adhésion du Maroc, n’a jamais été précisée. En 1992, l’article F du traité de Maastricht dispose que tout État européen qui respecte les principes démocratiques fondamentaux de l’UE peut demander à devenir membre de l’Union.

Comme ces conditions méritent d’être précisées, en 1993, le Conseil européen de Copenhague définit trois critères à remplir, politique, économique et d’aptitude, non au moment du dépôt de candidature, mais à celui de l’adhésion à l’UE. Le critère politique signifie : des institutions stables garantissant la démocratie, la primauté de droit, le respect des droits de l’homme et des minorités ainsi que leur protection. Le critère économique concerne l’existence d’une économie de marché viable, capable de faire face aux pressions commerciales et aux forces du marché à l’intérieur de l’UE. Le critère d’aptitude tient à la capacité d’assumer les obligations découlant de l’adhésion, et notamment de souscrire aux objectifs de l’UE et de disposer d’une administration publique nationale suffisamment compétente pour appliquer la législation de l’UE.

1er janvier 2015 : six pays ont officiellement le statut de pays candidat : Turquie, ancienne république Yougoslave de Macédoine, Monténégro, Islande, Serbie et Albanie.

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Corruption dans des pays candidats à l’UE
Source : Transparency International, IPC 2014. Cliquer sur la vignette pour agrandir la carte

Diapositive n°11

Toutefois, ces critères dits de Copenhague ne débouchent pas sur une claire définition des frontières. Et il faut constater une poursuite des demandes d’adhésion et, surtout, car cet aspect est souvent méconnu des citoyens européens, une poursuite par les autorités européennes de la reconnaissance de ces demandes d’adhésion en conférant aux pays concernés un statut avantageux, celui de pays reconnu officiellement comme candidat. Résultat : en mars 2015, pas moins de six pays ont ce statut de pays candidat : Turquie, ancienne république Yougoslave de Macédoine, Monténégro, Islande, Serbie et Albanie. Il convient de noter que, à part l’Islande qui compte moins de 300 000 habitants, tous ces pays comptent un PIB par habitant nettement moindre que la moyenne de l’UE 28, se situant entre le tiers et la moitié de la moyenne de l’UE.

Diapositive n°12

L’UE n’a pas hésité à délivrer ce statut en dépit de niveaux de corruption inquiétants, hormis en Islande. Et, dans le passé, le statut de pays candidat a toujours débouché sur une adhésion. En conséquence, si le futur s’avérait conforme à cette sorte de jurisprudence, à ce qu’on appellerait en prospective une tendance lourde, c’est une UE à 34 qui se dessinerait avec des frontières couvrant la majeure partie des Balkans, à l’exception de la Bosnie Herzégovine et du Kosovo, et s’étendant jusqu’aux frontières de la Géorgie, l’Arménie, l’Azerbaïdjan, l’Iran, l’Irak et la Syrie.

Mais, en réalité, il y a des « vrais » et de « faux » candidats. Les premiers sont ceux disposés à respecter les règles démocratiques de l’UE, ainsi que celles relevant de la supranationalité : l’Islande en faisait partie : ce pays a déjà intégré dans sa législation la quasi-totalité des règlements ou directives de l’UE, les applique réellement et se conforme aux principes de l’UE en termes d’État de droit. Mais son opinion publique, éprouvant sans doute des difficultés à savoir quel est le cap de l’UE, n’apparaît plus guère favorable à une entrée dans l’UE et a élu en 2013 un gouvernement de centre droit promettant de mettre fin au processus d’adhésion commencé en 2009 par la coalition de gauche alors au pouvoir, et pourtant très largement avancé. L’attitude défavorable de l’opinion publique islandaise s’est trouvée renforcée depuis 2013 notamment par l’évolution de la question grecque. En conséquence, le 12 mars 2015, le gouvernement de l’Islande a officiellement fait savoir à l’UE, par des lettres aux présidents du Conseil européen et de la Commission, que l’Islande retirait sa candidature d’adhésion à l’UE [12]. Il ne faut donc pas compter sur une prochaine adhésion de l’Islande à l’UE.

Parmi les autres pays candidats, les « faux » candidats sont ceux qui tirent des avantages financiers et politiques de ce statut de pays candidat, mais ne sont guère en situation d’appliquer réellement les principes de l’UE, compte tenu d’un soubassement institutionnel pour le moment peu favorable (Macédoine), ou n’en ont guère l’intention : c’est le cas de la Turquie actuelle [13]. Ce pays a tiré de nombreux bénéfices de ses rapprochements avec l’UE, puis du statut de pays candidat dont il dispose depuis 2005 : aide de l’UE pour des prêts internationaux à la Turquie (FMI, Banque mondiale), mise à l’écart d’une armée qui disposait d’importants pouvoirs politiques, financements conséquents de l’UE au service du développement de ses infrastructures, influence à Bruxelles puisqu’un pays candidat, bien que n’ayant pas de droits de vote au sein des organes européens, participe à nombre d’instances et dispose d’une large représentation à Bruxelles financée par l’UE, réception d’IDE (investissements directs de l’étranger) pour des montants considérables [14], accès à certains fonds européens, comme celui concernant les catastrophes naturelles, au même titre qu’un État-membre, larges possibilités pour le parti dominant depuis 2002, l’AKP, de venir en Europe mobiliser les ressortissants turcs pour orienter leurs votes en Europe s’ils sont naturalisés [15] et en Turquie (propagande, voire pratique récurrente d’achat de voix). Mais la Turquie actuelle refuse ce qu’elle juge être les inconvénients de l’UE. En témoigne le non-respect des libertés, à commencer par la liberté de la presse, puisque la Turquie est le pays au monde qui compte le plus de journalistes emprisonnés, ce qui ne peut qu’inciter les autres à de l’autocensure, non respect des droits des minorités (kurde, alévie, arménienne, chrétiennes), refus de toute supranationalité, guère de solidarité, c’est un euphémisme, dans la lutte des pays de l’UE contre l’État islamique (EI) et le terrorisme islamiste.

La Turquie, pourtant vrai candidat selon les instance de l’UE, peut en conséquence être considérée comme un vrai faux candidat, d’autant que l’on peut se demander si ce pays aurait véritablement intérêt à adhérer à l’UE [16]. S’ajoutent ensuite des candidats officieux.

Diapositive n°13

B. ...mais aussi des candidats officieux

L’Union européenne ne peut ignorer les pays de son voisinage géographique et s’est donc interrogée : comment tendre la main aux pays situés aux frontières de l’Union européenne mais sans s’engager au-delà de ses capacités ?

En partie à l’instigation des nouveaux Etats membres, courant mai 2004, une « Politique européenne de voisinage » est lancée, d’abord à l’intention des périphéries Sud et Est de l’Union européenne. Il s’agit – pour résumer – d’apporter aux pays d’Europe de l’Est et du bassin méditerranéen un soutien financier conditionnel pour les inciter à se rapprocher des normes européennes de l’État de droit et de l’économie de marché afin de faciliter leur développement. Ce soutien financier de l’UE est conditionnel, parce que l’UE s’autorise à vérifier le respect des engagements et l’usage de ses fonds. Cela est parfois mal perçu dans certains pays et peut scandaliser les esprits les plus délicats qui reprochent un soupçon d’approche géopolitique. Pourtant, ce n’est que du bon sens de demander que les subsides accordés soient bien utilisés.

Autrement dit, avec la politique européenne de voisinage, il s’agit pour l’UE d’étendre progressivement ses normes sans s’engager à promettre une adhésion ultérieure. Cela, bien évidemment, peut diminuer l’attractivité de la proposition pour les pays concernés qui préféreraient l’adhésion. Compte tenu de ces deux règles – conditionnalité et non-adhésion possible - , mais aussi de la qualité insuffisante de la gouvernance dans les pays concernés, les objectifs de la politique européenne de voisinage sont loin d’être atteints. Parallèlement, toujours en 2004, l’Union européenne propose à la Russie de bénéficier de cette politique européenne de voisinage, mais Moscou refuse, considérant qu’on ne peut lui proposer le même cadre qu’à des « petits pays » comme la Moldavie.

Puis cette politique européenne de voisinage se trouve déclinée en deux politiques correspondant à deux directions géographiques. La première – à compter de 2008 – est l’Union pour la Méditerranée [17]. A l’instigation de la France du président français Nicolas Sarkozy, il s’agit de proposer un projet plus spécifique aux pays méditerranéens. Cette stratégie à destination des frontières sud et sud-est de l’Union européenne est d’abord, fin 2007 et début 2008, l’occasion d’un bras de fer entre Nicolas Sarkozy et la chancelière allemande Angela Merkel, qui force la France à réintégrer ce projet dans le cadre communautaire, via le « Processus de Barcelone » qui existait déjà au profit des pays méditerranéens. La France se trouve d’autant plus contrainte d’accepter que c’est dans ce cadre du processus de Barcelone qu’il existe déjà des financements possibles. Le 13 juillet 2008, à Paris, l’Union pour la Méditerranée - Processus de Barcelone est officiellement installée. Puis l’opération militaire « plomb durci » conduite par les Israéliens sur Gaza du 27 décembre 2008 au 17 janvier 2009, suite à des tirs de roquettes palestiniens sur Israël, gèle durant six mois les réunions de l’Union pour la Méditerranée. Parallèlement, la crise financière entamée en 2008-2009, puis le début des révolutions arabes fin 2010-début 2011, qui voit notamment le renversement en Egypte du président Moubarak, qui n’était autre que le co-Président de l’Union pour la Méditerranée avec Nicolas Sarkozy, rabotent les ambitions initiales. Pour autant, le diagnostic reste pertinent, l’Union européenne ne peut se désintéresser de ce qui se passe à ses frontières Sud et Sud-Est.

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Carte. Le partenariat oriental de l’UE...
... concurrence l’union douanière espérée par la Russie. Source : G-F Dumont, P. Verluise, "Géopolitique de l’Europe. De l’Atlantique à l’Oural", PUF, 2015, p. 145.

Diapositive 14

La deuxième politique spécialisée, tournée géographiquement vers l’Est, est mise en place en mai 2009 sous le nom de « partenariat oriental ». Né d’une initiative conjointe de la Pologne et de la Suède, ce partenariat oriental consiste à développer une politique plus cohérente et plus ciblée à l’Est. Les pays concernés, présentés sur cette carte réalisée par les PUF sont six anciennes républiques soviétiques, indépendantes depuis 1991, soit, du Nord au Sud puis d’Ouest vers l’Est : Biélorussie, Ukraine, Moldavie, Géorgie, Arménie et Azerbaïdjan. Sans promettre une adhésion, il s’agit également d’étendre au moins une partie des normes de droit économique et commercial et de gouvernance de l’Union européenne et d’intensifier les échanges commerciaux [18]. Insistons sur deux caractéristiques, souvent omises, de ce partenariat oriental.

En premier lieu, au moins trois des six pays concernés sont officieusement candidats à l’Union européenne : la Moldavie – dont la candidature officieuse est portée par la Roumanie -, l’Ukraine – dont la candidature officieuse, voire semi-officielle, est portée par la Pologne et le président ukrainien élu en juin 2014 Petro Porochenko -, et la Géorgie – dont la candidature officieuse a été moult fois exprimée en privée par Tornike Gordadze, ancien ministre adjoint au ministère des Affaires étrangères de Géorgie, négociateur en chef pour l’Accord d’association Géorgie-Union européenne. Toutefois, la Moldavie, depuis les élections parlementaires de novembre 2014, les deux partis pro-russes ont obtenu une minorité de blocage et l’engagement du gouvernement de « sauvegarder les bonnes relations avec notre principal partenaire, la Russie ». En conséquence, la Moldavie semble moins orientée vers l’UE et davantage pro-russe que précédemment.

Toutefois, la Moldavie, comme l’Ukraine et la Géorgie, ont signé, en 2013 ou 2014, un Accord d’association avec l’Union européenne. Concernant l’Ukraine [19], suite aux pressions de la Russie, le président Viktor Ianoukovitch avait refusé, au dernier moment, de signer cet accord au sommet du partenariat oriental de Vilnius des 28-29 novembre 2013, ce qui a été un des éléments essentiels de déclenchement de la révolution Maïdan [20]. Finalement, l’accord a été validé le 16 septembre 2014 par le parlement ukrainien.

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Carte de l’Europe stratégique
Cliquer sur la vignette pour agrandir la carte. Réalisée par C. Bezamat-Mantes. Source : G-F Dumont, P. Verluise, "Géopolitique de l’Europe. De l’Atlantique à l’Oural", PUF, 2015, 3e de couverture.

Diapositive n°15

Seconde caractéristique, comme le montre la carte de l’Europe stratégique réalisée par Charlotte Bezamat-Mantes, les trois pays du partenariat oriental qui ont signé un accord d’association avec l’Union européenne ne sont pas souverains sur la totalité de leur territoire. En effet, depuis le début des années 1990, la XIVe armée russe occupe la Transnistrie, une région située