Serbie: le financement des partis politiques, un véritable panier de crabes

B92/COURRIERDESBALKANS
Traduit par Jacqueline Dérens
Mise en ligne : vendredi 15 février 2013
Les partis politiques sont souvent au coeur des circuits de corruption en Serbie, en raison de leur proximité avec les acteurs des marchés publics. Et malgré une nouvelle législation plus sévère, rien ne semble vouloir changer dans ce domaine.

Selon Vladimir Goati, président de Transparency Serbia, les partis politiques sont des acteurs privilégiés de la corruption dans le pays, un panier de crabes évalué au bas mot à plusieurs millions d’euros.

Ce tableau peu reluisant brossé au cours d’un entretien avec B92 tient au fait que les partis politiques sont les organisations « les plus puissantes », où la corruption prospère. Les malversations ont souvent lieu dans ce triangle des Bermudes composé des partis politiques et des entreprises publiques ou d’Etat, où l’argent du pays disparaît dans des achats publics.

Jusque dans les années 2000, le financement des partis politiques du pays se faisaient suivant « des circuits complètement illégaux », explique Vladimir Goati, ajoutant qu’aujourd’hui une nouvelle législation est entrée en vigueur, mais qu’il n’a pas l’impression qu’elle soit vraiment mise en place.

« Nous avons fait une enquête en juillet et nous avons la certitude que les partis ont dépensé plus qu’ils n’avaient en caisse et plus que ce qu’ils recevaient. J’en ai déduit qu’il s’agissait là d’alchimie qui consiste à créer quelque chose à partir de rien. Je n’ai pas de meilleure explication à donner », a commenté Goati qui voudrait que la Cour des comptes et l’Agence de lutte contre la corruption réagissent à cette forme de malversations.

Des élections anticipées sur le thème de la lutte anticorruption ?

Il croit aussi que la campagne contre le crime organisé dont le Premier vice-Premier ministre, Aleksandar Vučić, s’est fait le champion, était « sérieuse, et ne poursuivait pas de petits objectifs » et qu’il y avait là matière à être optimiste. Toutefois, il ne s’agit pas d’une tâche facile « parce que vous ne savez pas sur quel parti vous allez tomber, quand vous allez mettre en cause un partenaire de votre coalition ou un proche de votre parti. » Il a toutefois félicité Aleksandar Vučić « pour manœuvrer mieux que prévu ».

Le responsable de Transparency Serbia est convaincu que c’est une raison pour convoquer des élections anticipées : « tout cela fournit de bons arguments en faveur du déclenchement d’un scrutin puisque le parti-clé dans la coalition gouvernementale, le SNS, jouit d’une bien meilleure estime depuis que le gouvernement a été formé. Il pourrait avoir une chance de gagner une majorité encore plus confortable ».

Interrogé sur la façon dont les institutions pourraient gagner en crédibilité, Vladimir Goati a répondu qu’il fallait du temps et de la stabilité. « En Europe, les partis politiques sont mal considérés, mais les gens se rendent compte que c’est un mal nécessaire. Chaque responsable de parti est confronté à la question de savoir comment gagner en crédibilité et cette question détermine le sort qui lui est réservé aux élections. Les groupes sociaux qui votent pour tel ou tel parti regardent si les promesses sont tenues, si elles répondent aux valeurs, aux intérêts, aux objectifs présents et à venir ».