Banja Luka & Belgrad, segona Diada de la Unitat Sèrbia

« Journée de l’unité serbe » : Banja Luka et Belgrade font le grand jeu

| Correspondance particulière | mercredi 15 septembre 2021

Belgrade et Banja Luka célèbrent le 15 septembre, pour la deuxième fois, la « Journée de l’unité serbe ». En Republika Srpska, le gouvernement a imposé dans les écoles une série d’activités auxquelles tous les élèves doivent participer. Au grand dam de beaucoup d’enseignants.

Par Marion Roussey

Republika Srpska–Serbia relations - Wikiwand

La rentrée commence tambour battant pour les élèves de Republika Srpska, l’entité serbe de Bosnie-Herzégovine. Du 7 au 15 septembre, les écoles primaires et secondaires ont préparé la « Journée de l’unité serbe, de la liberté et du drapeau national ». Objectif pour le ministère de l’Éducation et de la Culture qui chapeaute le projet : « raviver la mémoire des personnages historiques et des événements qui ont contribué à la liberté, à l’indépendance et à l’unité du peuple serbe ». Pour cela, un programme pédagogique a été mis en place, avec photos, vidéos et documents historiques promouvant les valeurs serbes auprès des enfants.

Principal événement mis en valeur : la percée du Front de Salonique le 15 septembre 1918, tournant majeur de la Première Guerre mondiale. Pour les autorités serbes, la date est hautement symbolique : elle marque la libération des peuples slaves des Balkans et la création du Royaume des Serbes, Slovènes et Croates. « Cette date devrait être célébrée par tous les peuples des Balkans », estime Predrag Damjanović, directeur de l’Institut pédagogique de l’entité serbe, interviewé par Radio Slobodna Evropa. « C’est la libération de plusieurs nations, et les Serbes y ont joué un rôle-clé qu’il est important de rappeler. »

Le 15 septembre a été choisi l’an dernier par Belgrade et Banja Luka comme journée de l’unité serbe. Malgré les restrictions liées à la pandémie, une grande cérémonie avec hymne national et drapeaux sur les institutions et bâtiments publics a eu lieu dans les deux villes. Cette année encore, un cortège est prévu et les clips patriotiques aux couleurs du drapeau serbe ont déferlé sur les réseaux sociaux.

A Banja Luka, les élèves des 44 classes du secondaire sont conviés à la préparation de la cérémonie. Leur présence est obligatoire, quelle que soit leur nationalité. L’annonce a fait bondir certains parents d’élèves qui dénoncent une nouvelle pression sur les enfants croates et bosniaques de Republika Srpska. Elle a aussi été critiquée par les enseignants et experts. « Il n’y a pas de position unique sur les jours fériés au niveau de l’État en Bosnie-Herzégovine », note Dejan Lučka, directeur du Centre pour les droits de l’homme à Banja Luka. « Chaque groupe ethnique célèbre ses propres jours fériés. Cela tend à aggraver les divisions de la société. Si les nouvelles générations continuent d’avancer ainsi, ces divisions vont se renforcer au lieu de s’estomper. »

Promouvoir ’l’unité serbe’ permet de protéger les intérêts d’un parti et de ses représentants.

Le concept d’unité serbe a fait couler beaucoup d’encre cet été. Depuis la loi promulguée fin juillet par l’ancien Haut-représentant international en Bosnie-Herzégovine pénalisant la négation du génocide de Srebrenica, l"Union des sociaux-démocrates indépendants (SNSD) revendique l’unité comme un droit fondamental à défendre. Pour Dejan Lučka, ces revendications sont stratégiques : « Le gouvernement de la Republika Srpska a été secoué par de nombreux scandales et l’opposition gagne du terrain, comme l’ont révélé les élections municipales de 2020 à Banja Luka. Promouvoir ’l’unité serbe’ permet de protéger les intérêts d’un parti et de ses représentants, d’autant que le SNSD au pouvoir interprètera toute critique de l’opposition comme une trahison des intérêts serbes ».

Ce n’est pas la première fois que les gouvernements de Milorad Dodik et d’Aleksandar Vucić avancent main dans la main. Début septembre, les deux Parlements ont adopté des projets de loi visant à inciter à l’usage de l’alphabet cyrillique, le rendant obligatoire pour certains documents administratifs. La Republika Srpska et la Serbie ont également annoncé le 12 septembre leur intention de construire un centre commémoratif qui rappellera « tous les crimes contre les peuples serbes ».

Préparatifs à Belgrade

Belgrade s’est aussi mise en frais pour célébrer le 15 septembre. Ces derniers jours, la circulation était bloquée à partir de 17h dans le centre de la capital pour cause de répétition générale. Ce mercredi, elle sera suspendue toute la journée. L’année scolaire a aussi commencé en fanfare, le gouvernement de Serbie ayant pris la décision de faire chanter l’hymne national, Bože pravde (« Dieu de justice ») dans toutes les écoles. Le ministre des Affaires étrangères, Nikola Selaković, a ensuite demandé à tous les Serbes, où qu’ils soient, d’arborer ce 15 septembre des drapeaux nationaux. L’obligation de jouer cet hymne, qui dit que « Dieu sauve la nation serbe », a diversement été accueillie dans le sud du pays. Dans le Sandžak, des enseignants bosniaques ont ainsi exprimé leur refus. Des problèmes similaires sont apparus à Bujanovac et Preševo, où se concentre la communauté albanaise.

À Belgrade, la Journée de l’unité, de la liberté et du drapeau national serbe sera donc marquée par toute une série de manifestations, dont la plus importante se tiendra sur la Place Sava, autour du monument à Stefan Nemanja, où s’exprimeront le Président Aleksandar Vučić, le membre serbe de la présidence de Bosnie-Herzégovine Milorad Dodik, et le patriarche Porfirije.